[BG Tengu] Le Corbeau de la Tempête

Chapitre I: La mort n'est pas une fin.

Le Bahmi était perclus de douleur, allongé en position fœtale, il ne voyait qu’une lumière rougeoyante diffuse à travers ses paupières closes. Puis un bruit de succion, le liquide chaud qui couvrait son corps était aspiré par en dessous et il sentit, plus qu’il ne vit, que l’espèce de cuve dans laquelle il était plongé venait de s’ouvrir. Il respira par réflexe mais l’air était chaud et sentait l’huile, laissant un goût âpre dans sa gorge. Sa tête lui faisait un mal horrible, comme si quelqu’un avait enfoncé un tison brûlant dans son crâne.
Le puissant Bahmi sentit ses réflexes se dénouer, et son instinct de combattant prit le dessus lorsqu’un être au teint diaphane aux yeux globuleux et vert fluorescent se rapprocha de la cuve, levant un grand bâton. Le guerrier ne chercha pas à savoir, ses réflexes jouèrent et une violente ruade envoya le pauvre technomancien Eth de l’autre côté de la pièce dans un léger bruit d’os et de verres cassés.
Le guerrier tenta de se lever dans un regain d’énergie, mais son corps n’était plus que douleur et fatigue, il arriva à faire front à ce qui lui semblait être une menace mais il s’écroula pour sombrer dans une noire inconscience pleine de cris et de fureur comme l’écho d’une bataille ancienne, terrible et sanglante, des éclairs déchirant cette noire nuit d’où surgissaient alors des visages semblants familiers de cadavres gisant sur le sol, au pied d’une bête monstrueuse… Et c’est en criant « Crucia !» que le guerrier reprit conscience dans une pièce plus éclairée et surtout l’esprit moins embrumé. Ce qui n’eut d’autre effet que de faire sursauter le malheureux Eth qui se trouvait sur le lit de convalescence non loin et à qui on faisait des bandages pour réparer la fracture de son bras causée par son précédent vol plané.
Rapidement deux gardes Bahmi s’approchèrent de leur frère d’arme et, calmement mais fermement, le calmèrent autant par les mots que par l’opposition de leur force.

Une jeune Mathosienne arriva alors, sa peau mate tranchait avec la blondeur de ses cheveux, elle s’approcha du guerrier et lui raconta qu’il était un Etre Elu, un protecteur de Télara que les Veilleurs n’avaient pas choisi de ramener à la vie, mais que la science des Eth et d’Orphiel avait ramené par delà les rivières du Temps et du Néant.
Le guerrier n’était pas convaincu du tout, dans sa tête il se souvenait qu’il était issu d’un peuple du plan de l’Air, autrefois au service de la Maîtresse des Tempêtes : la Dragonne Crucia. Ramené à la vie, il ne pouvait en douter, mais être Elu… un truc réservé aux peuples protégés par les Veilleurs, franchement là non… Un Eth à la rigueur, mais un Bahmi ou un Kelari « Elu » ça dépassait son entendement.
On lui expliqua les évènements récents et cette folie qui voulait qu’on le renvoie dans son passé… Ce qui au passage ferait de lui un écho de sa propre personne «dopé à la machine Eth», son esprit n’arrivait pas à accepter ne serait-ce que le concept. La seule chose qu’il retenait c’est qu’il était mort sur un champ de bataille et qu’on lui offrait une seconde chance et de faire pencher la balance en faveur de son peuple, le reste après franchement, passé, futur, Etre Elu et tout le tremblement il n’en avait cure. Même s’il prenait note de toutes ces informations, l’important pour lui était de retrouver les siens…
Et c’est en faisant cette réflexion qu’il eut un grand blanc dans sa tête… Ses proches, il se souvenait d’eux comme on voit une ombre dans le brouillard, il ne pouvait douter de leur existence, mais il était incapable de leur donner un nom.. un lieu… une date… le blanc total…
Il se souvenait de sa femme douce et forte guerrière comme lui, il se souvenait des sensations qu’il avait en sa présence.. mais il ne se souvenait pas de son nom..
Il se souvenait qu’il faisait partie d’un groupe de combattants dont le symbole était un oiseau noir…. un corbeau. Plus il se mettait à y penser plus les souvenirs lui revenaient mais parfois, il avait l’impression qu’une autre mémoire se greffait à la sienne, ou pire, que le fond des choses, comme le nom des gens, des lieux ou la date des évènements, lui étaient délibérément cachés par un terrible voile opaque.
Plus il s’acharnait plus il avait l’impression qu’il ne s’agissait pas d’une punition ou d’une malédiction, mais plutôt une sorte de sauvegarde, une protection. Comme si une étrange magie avait fait en sorte que toute information qu’il aurait pu fournir pour identifier les membres de ce groupe « Corbeau » et ses agissements ne lui étant plus accessible, il ne pourrait leur nuire.

Maintenant il devait aller de l’avant et comprendre tout cela, il quitta donc Terminus pour prendre le chemin vers le tunnel temporel. Il fut remis en condition et jugé apte sur le terrain… Avec d’autres combattants dont une guerrière Bahmi : Soragami, il prit la route à travers la machine… Comme il ne souvenait pas de son nom Soragami le baptisa « Tengu » qui dans la langue de son clan signifiait « démon corbeau » …
Et Tengu arriva à Libremarche…